Les attentats à la bombe du dimanche de Pâques ont tué 269 personnes et en ont blessé plusieurs centaines d’autres. Trois ans après les évènements, une délégation de victimes et de responsables de différentes communautés religieuses a rendu visite au pape François dans le cadre d’une campagne visant à faire la lumière sur les responsabilités des attentats. Le Saint-Père a demandé aux autorités sri-lankaises de faire toute la vérité sur les attentats du dimanche de Pâques 2019.
Le cardinal Malcolm Ranjith a accompagné un groupe de pèlerins sri-lankais, dont de nombreuses victimes des attentats du dimanche de Pâques 2019, lors d’un voyage à Rome. Le voyage a été effectué pour commémorer le troisième anniversaire du funeste complot terroriste du 25 avril.
Lors d’une audience avec le pape François, l’archevêque de Colombo a évoqué la douleur de la communauté face au manque de réponses et de clarté sur les véritables auteurs des attaques terroristes qui ont fait 269 morts et des centaines de blessés.
« Trois ans se sont écoulés depuis ces attentats, mais nous n’avons toujours pas découvert les véritables auteurs. Dans un premier temps, la responsabilité a été rejetée sur la communauté islamique, mais aujourd’hui, des éléments indiquent un complot politique, avec des connexions entre certains groupes politiques et les extrémistes qui ont posé les bombes. »
« Certains milieux ont essayé de créer un conflit interreligieux entre nous. Mais nous avons veillé à ce que cela ne se produise pas », a déclaré le cardinal au pape François, en soulignant que la délégation sri-lankaise était composée de représentants non seulement de la communauté catholique, mais aussi de protestants, de musulmans, de bouddhistes et d’hindous.
Le cardinal Ranjith a demandé au pape François de prier pour sa communauté et pour le Sri Lanka « afin que le Seigneur bénisse notre chère nation et l’aide à abandonner le chemin qu’elle emprunte actuellement, un chemin d’extrême pauvreté, de corruption, de divisions entre les différents groupes religieux et ethniques, d’oppression, d’insécurité, d’inégalité dans l’application de la loi, de manque de respect pour les droits de l’homme et pour la dignité humaine. Que le Seigneur nous donne le courage de tendre la main à tous ceux qui appartiennent à d’autres ethnies et à d’autres religions, afin de nous engager sur un nouveau chemin ».
Après la rencontre, le cardinal s’est entretenu avec des journalistes lors d’une réunion informelle organisée par la fondation Aid to the Church in Need : « Le gouvernement a tout caché, rejetant toute la responsabilité sur un groupe de musulmans radicaux. Ils veulent créer des tensions entre chrétiens, musulmans et bouddhistes. Nous ne voulons pas de cela. Nous voulons vivre en paix avec tout le monde. Nous voulons savoir qui est à l’origine de ce complot ».
En réponse, le pape a lancé un appel pressant au gouvernement sri-lankais. « S’il vous plaît, pour le bien de la justice et pour le bien de votre peuple, nous demandons à savoir une fois pour toutes qui est responsable », a déclaré François.
Le cardinal estime qu’il ne s’agit pas d’un problème de persécution religieuse, mais plutôt d’un manque de respect général pour la dignité humaine. « L’Église n’est pas menacée au Sri Lanka, mais les droits de l’homme le sont. Au Sri Lanka, nous assistons à une lutte entre la population sri-lankaise et le gouvernement. Le gouvernement a fait des erreurs en matière de politique économique, par conséquent, de nombreuses familles souffrent de pauvreté et peinent à se nourrir. Il y a une extrême pauvreté, et nous voulons aussi parler de ce phénomène pour que la communauté internationale puisse nous aider, mais sans soutenir ce gouvernement dictatorial qui ne respecte pas les droits de l’homme », dit Mgr Ranjith.
« J’étais la fille qui a dit que Dieu n’existait pas ».
Parmi les dizaines de personnes qui ont fait le voyage du Sri Lanka à Rome se trouvaient plusieurs survivants des attentats, dont beaucoup ont été gravement blessés.
Gloriya George était à l’église ce jour-là avec son père et sa sœur. Elle porte encore les cicatrices de l’explosion. Le pire cependant n’est pas l’altération de son audition, mais la mort de son « Dadda ».
« Chaque jour, il me manque. Mon papa est mort dans mes bras. Je l’ai vu rendre son dernier souffle dans mes bras. Cela fait trois ans que nous nous battons dans notre pays, mais nous n’avons pas obtenu justice. Toutes les nuits, je me demande qui a tué mon père. C’était un meurtre de sang-froid planifié à l’avance. Nous n’avons pas obtenu justice de notre pays. C’est pourquoi nous sommes ici pour demander justice au niveau international, non seulement pour moi, mais pour tous les innocents qui ont été victimes ce jour-là. Ainsi, je pourrai dormir enfin en paix », dit-elle.
Au lendemain de l’attaque de 2019, Gloriya a été interviewée par Sky News le jour des funérailles de son père, et a exprimé sa colère, y compris envers Dieu. » Dieu n’existe pas. Personne n’est venu nous aider », s’est-elle exclamée.
Trois ans plus tard, cependant, son discours a changé. « Je suis la fille qui a dit ‘Dieu n’existe pas’ aux médias internationaux. Mais ici, je suis devant la basilique et je dis qu’il y a un Dieu, un Dieu vivant, et que c’est grâce à Lui que nous sommes ici. J’ai senti qu’il y avait un Dieu. Il a commencé à me montrer qu’Il était là. Mon père est mort par la faute de l’homme. Dieu voulait l’empêcher. Les gens de notre pays ont été négligents, ils ont voulu que cela arrive, pas Dieu. »
Après les attentats à la bombe, Aid to the Church in Need est venue en aide à l’Église sri-lankaise et à ses membres traumatisés, en finançant un soutien psychosocial pour les familles touchées et endeuillées et en contribuant à former des prêtres, des sœurs et des responsables laïcs pour qu’ils puissent faire face à des situations tragiques et fournir l’aide la plus urgente et la plus appropriée lors de telles catastrophes. Depuis lors, ACN a continué à soutenir l’Église au Sri Lanka, notamment pendant la pandémie de Covid-19.